Bienvenue au Maroc, mon ami!
Bon, on ne vous a pas encore parlé du gite Tachmyrte et de notre expédition dans la cédreraie d'Azrou.
On est arrivé après bien des méandres dans Meknes à choper un grand taxi pour Azrou. On a d'abord marché, on s'est trompé. On a ensuite marché, on s'est tendu, on s'est trempé aussi -il pleuvait à grosses gouttes ce matin-là. Puis on a marché en se trompant moins, mais en se détendant? Pas encore!
C'était des torrents qui tombaient du ciel à l'extérieur. Soudainement, il y avait des milliers de marchands de parapluie, totalement absents la veille! Fanch s'est d'ailleurs émerveillé devant une envolée de parachute au beau milieu de l'avenue! On s'est finalement mis à l'abri dans une espèce de marché couvert. D'ailleurs, les halles de Meknès qui doivent savoureusement filtrer le soleil par ses fissures au printemps, laissaient là piteusement passer la flotte par endroits! Mais bon, c'était plaisant à observer tout de même ces montagnes d'avocats et de mandarines, ces collines de cornes de gazelle et de griwech ou plus crûment ces têtes d'agneau à la langue pendante et ces cervelles d'on ne sait trop quelle tête animale... Quand les torrents sont devenus petites rivières, on s'est aventuré dehors à nouveau où des marchands ambulants cherchaient à sauver leurs étales avec des bâches en plastique improvisées, très calmement ceci dit par rapport à la menace de l'humidité ambiante sur les bons petits pains tout ronds qui devaient faire la recette de la journée.
Bref, le soleil revient... On se détend, un peu. On ne se trompe plus et on finit par passer une porte de la ville derrière laquelle c'est la fourmillière aux taxis. Il y en a de partout. On en trouve un. On nous annonce un prix qui est celui qu'on nous avait dit... Et qui à cinq, est plus léger que le bus. On s'en tire pour 15 euros en taxi jusque Azrou qui est à une heure au bas mot. On s'engouffre dans le taxi, au chaud et au sec. On s'éloigne de la ville et peu à peu, la route se met à monter. Rassurez-vous, ce n'est pas l'Himalaya mais ça monte tout de même un peu, mes zamis! Il flotte, peut-être même qu'il grêle. Le paysage se dénude... Laissant derrière des banlieues toujours en travaux mais qu'on dirait abandonnés. Des bâtiments de grosses briques rouges (un peu comme les bons vieux parpaings de chez nous quoi) dont les vitres et les toits sont absents. On voit des belles montagnes à l'horizon...
On arrive à Azrou après une heure de taxi. Azrou n'est pas petit mais paumé. On a froid. Il pleut. On a un vague contact d'un gite. On se met au chaud au café Bellevue où on nous fait asseoir comme des rois sur des beaux canapés en skaï blanc où chacun sirote un truc fumant pour se réchauffer. Jean-sam appelle le contact.
Aziz du gite Takchmyrte arrive dans le quart d'heure. Il nous emmène. Une espèce d'ours des bois le gars. Il nous propose un tajine mitonné par sa femme pour le soir. On signe des dix doigts. Le tajine sera bon mais le feu dans le micropoêle encore meilleur... Une vraie prière pour l'allumer.
On dort bien et on attend le lendemain pour faire des grands projets.
Le lendemain, petit déjeuner... Aziz déboule au milieu. On lui demande des bons plans de petite marche. Il nous évoque le cèdre Gouraud et la forêt de cèdre. Il nous y déposera une demi-heure plus tard en nous indiquant un vague chemin dans la forêt.. Nous annonçant en arrivant qu'"au fait, le cèdre Gouraud est mort depuis deux ou trois ans mais, il est toujours debout, mon ami!"
Il neige... Fanch est en bottes en caoutchouc, Malo en pantacourt et baskets éponges, Marjane en baskets pas éponges mais un peu poreuses tout de même. Les singes magots nous accueillent ainsi que les attrapes couillons. On passe notre chemin, surtout moi devant ces bestioles qui ne m'inspirent rien qui vaille (les singes hein, les autres ça va, j'arrive à gérer). J'imaginais déjà leurs griffes dans mon bonnet pour voir ce qu'il pouvait y avoir dessous. Bref, on n'est pas équipés pour la montagne mais on se dit que c'est tout de même fou de se retrouver à marcher sous la neige. On est bon public, on y va quoi.
Après le quart d'heure de liesse insouciante, Malo fait sploch sploch avec ses baskets... Il a froid. Fanch à qui on s'est évertué à dire de ne pas faire de boule de neige mais qui les a tout de même faites découvre avec effroi le froid au bout de ses petits doigts. On fait le point du bilan. J'échange de chaussures avec Malo... J'aurai un pantalon mais des chaussures mouillées et lui un pantacourt mais des chaussures sèches. Et on continue. La forêt est belle. Il y a des couleurs malgré le ciel blanc laiteux. Les enfants marchent comme des sherpas et s'éclatent...
On fait environ 4 km avant d'arriver à une route goudronnée comme nous l'avait indiqué Aziz... On est gelé et des échopes attrape-couillons nous tendent les bras. Y'en a même une qui a l'air mieux achalandée que les autres dis donc : de la fumée s'envole de son petit toit en bois. On tourne autour et Ahmed nous tend un verre de thé à la menthe, nous invite à nous asseoir pour nous réchauffer. On se demande toujours s'il ne faudra pas allonger des dirhams à la fin. Mais on se laisse tenter... Et on a bien fait, les enfants admirent les cristaux qu'il vend mais on repart comme on est venu, riches de son hospitalité en plus.
On attaque la route goudronnée. Sympa la randonnée Aziz. Y'a des voitures et des camions qui déboulent devant derrière. Des singes nous suivent dans notre expédition certes, il y a des beaux arbres encore certes... mais ta balade, franchement mon ami...
En plus, comme on descend, ben il ne neige plus. Vous aurez deviné ce qui nous tombe sur la truffe! Les fameux torrents de Meknès sont de retour. Mais bon, on marche. Puis, dans une ligne droite, une sorte de Pick-up ralentit après nous avoir doublés, s'arrête, recule et ô miracle, nous ouvre ses portes. Son conducteur nous ramènera à bon port. Il nous offre même un sac de cumin dont le parfum innondait l'intérieur de son véhicule. On lui propose une clope ou quelques dirhams... mais lui non plus n'en veut pas. "Hors de question mon ami! Bienvenue au Maroc!"
On rentre au gite où on se dit que le père Aziz, il nous aura fait un petit feu dans son micropoële... Mais le feu ne crépite pas. On lui demande... On peut faire un p'tit feu pour se réchauffer un peu? "Ah naaan mon ami! Le feu c'est le soir. On fait des économies!"
Bref, il n'y a pas que les déserts de sable au Maroc, il y a aussi la neige, mon ami!
Au fait, Aziza, la femme d'Aziz, nous allume un feu très rapidement après le refus de son ours...