Ma cabane au Canada...
Beluga est tout près de Baddek. Il n'abrite plus que nous cinq après avoir ouvert ses voiles au padre. Alors, on se sent creux. Chaque visite modifie l'espace temps beluguéen. Une fois que ça se termine, il faut faire avec ce qui reste. Et c'est pas facile car ce qui reste, ce sont des trous. Une cabine un peu trop vide, un évier moins chargé, une brosse à dents évaporée du gobelet de la salle de bain, une paire de bottes en moins dans le carré, une assiette et un verre à retirer quand on met le couvert. Puis ces petits vides ont le chic pour vous en rappeler des plus grands. Vides exigés par tout voyage un peu loin, un peu long. Un gars nous avait dit ça un jour. Partir, c'est avant tout quitter!
Alors parfois, ces petits trous finissent par peser lourd. Creux pesant qui assomme par son paradoxe. La dernière fois, quand l'avion des cousins s'était envolé, il y avait celui d'Halifax qui devait atterrir. On n'avait pas trop l'temps de traîner sur les côtes etatsuniennes et la fenêtre météo s'était emparée de nos états d'âme en les nourrissant de tortues luth, de brume, de poisson lune et de soleil perçant. Cette fois, personne n'a eu la bonne idée de nous rejoindre à Saint-Pierre et Miquelon. Et la fenêtre météo à la gueule d'une lucarne de mansarde parisienne en plein coeur de l'hiver. Alors tu restes là avec ces vides qui pèsent un âne mort. Et les questions s'immiscent dans ces fissures, fusent et tournent en boucle sans que personne ne parvienne à leur fermer l'clapet. Partir malgré la lucarne ? Terre Neuve plutôt que Saint-Pierre? Redescendre vers le Sud plutôt que retransater vu les dépressions - du ciel hein, nous on n'en est pas là !- vu les dépressions qui prennent du souffle et la saison qu'on sent prête à basculer? On ne parvient à aucune décision stable et définitive car chacune exige de tuer le choix et qu'on n'est simplement pas en mesure d'en faire un!
Beluga a laissé le petit port de Baddek sans très bien savoir où pointer l'étrave. Finalement, un léger crachin nous a dirigés vers le mouillage le plus proche. Un petit trou au bout d'une rivière où il a jeté l'ancre. On va se lover là tous les cinq et faire le gros dos en attendant que ça passe, que certains vides se transforment en bons souvenirs et que les autres deviennent des projets, ici, dans notre petite cabane au fin fond du Canada.
Virée bretonne !
Vendredi dernier, papa et papy sont allés louer une voiture pour le week-end. Nous sommes partis le matin et nous nous sommes mis en quête d'un motel où passer la nuit. En milieu d'après-midi, nous n"avions toujours rien trouvé. Le cape breton est en fait très touristique ! Profitant d'une miraculeuse connexion au réseau mobile, maman a contacté une sorte d'office du tourisme. Par chance, un cottage s'était libéré à 60 km! On était sauvé et on n'a pas été déçu ! Là bas, il y avait TV, baignoire, lits moelleux, canapé et et et... Toasteur ! Nous nous y sommes plus comme des rois !
Le soir même, nous avons découvert un tambour de machine à laver mis là pour y faire des feux. Marjane, Fanch et moi sommes directement allés à la plage à la recherche de bois mort. En deux aller-retour, nous en avions amassé un joli tas que nous avons transformé en immense feu de joie.
Le lendemain, après un festival de tartines grillées, nous sommes partis en randonnée sur la skyline du parc naturel des highlands. Nous y avons croisé des orignaux et mangé des framboises sauvages.
Nous avons ensuite continué notre périple jusqu'à Meat Cove, l'endroit le plus reculé possible ! C'est là que maman a oublié son sac contenant carte bancaire et papiers importants. Nous nous en sommes rendus compte après une heure et demi de route et il nous restait encore au moins la même chose pour rejoindre St Peter où était Beluga. Nous avons tout de même décidé de rebrousser chemint Nous l'avons retrouvé posé au milieu des nombreux kerne de la plage, à la lumière d'une frontale !
Mais nous n'en avions pas fini... Nous n'avions plus assez d'essence pour rejoindre le bateau et toutes les pompes fermaient à 21 heures! Aucune automatisée ! Nous avons donc dormi à six dans la voiture, attendant 8 heures l'ouverture de la pompe.
Pour compenser ces mésaventures, nous nous sommes faits un méga petit déjeuner. Les pains au chocolat étaient légendairement exquis!
Déserts de Nouvelle-Ecosse
Nous voilà dans l'Atlantique Nord. Certains d'entre nous l'attendaient un peu avec impatience après quelques nuits tropicales étouffantes où moustiques et sueurs s'allient et transforment doux rêves en cauchemars. Le beurre aussi semblait attendre un peu de fraîcheur. Notre groupe froid étant gravement décédé, il fondait lamentablement quelque soit notre système D de refroidissement. On rêvait donc de beurre solide et de nuits ventilées. Les nuits se sont refroidies, nous permettant de renouer avec un sommeil sans obstacles jusqu'à l'aurore et le beurre a retrouvé une consistance normale. On peut même conserver du lait plus d'une journée sans qu'il ne se transforme en fromage. Nos banettes sont à nouveau équipées de couettes où chacun s'enroule avec grand plaisir après une soirée frisquette. Les shorts sont au placard et les jeans de sortie, les bottes ont détrôné les tongs et les bonnets les borsalino. On a retrouvé les manches aussi, et avec elles, cette désagréable expérience qu'on avait oubliée, celle des manches que tu remontes pour faire la vaisselle mais qui finissent toujours par redescendre en effleurant l'eau grasse juste avant que tu n'aies le temps de les remonter à nouveau! L'eau des réservoirs atteint une température où il devient difficile d'envisager une douchette même éclair sur la jupe arrière. Le ciel a perdu ce bleu profond, son soleil fidèle et ses vents réguliers.
On surfe et... Pas sur de l'eau!
Nous sommes allés aux quais du waterfront de Halifax. Fanch et moi, nous étions dans ma cabine en train de "coudre" quand Papa nous a crié de venir voir. Nous sommes donc allés dehors. Une fois sortis, j'ouvris grand les yeux et je sentis une bouffée d'excitation monter en moi. On était amarrés a un petit ponton normal mais autour de nous, sur la terre, il y avait des restos, des petits immeubles et plein de personnes qui grouillaient à coté de tout ça.
On s'est très vite préparé tellement on avait envie d'aller visiter Halifax. Nous avons fait un peu de skate avant de partir et Malo a continué à en faire jusqu'à ce qu'on arrive sur une grande place. Au centre il y avait une très grosse (et fausse ) vague sans doute en béton. Il y avait aussi un bâtiment décoré d'écriture et de queues de baleine et même un sous-marin (en plastique) transformé en pleine de jeux. Fanch et moi, nous avons foncé droit dessus, après avoir demandé si on pouvait... On essayait de grimper tout en haut mais presque à chaque fois, on s'arrêtait à la moitié et on glissait sans pouvoir lutter.
Mais à un moment, j'ai pris un grand élan, pieds nus, et j'ai couru vers la vague. En chemin, j'essayais de ne pas glisser en appuyant fort sur mes pieds... Et j'ai réussi à monter au sommet.
Après, c'est devenu un jeu d'enfant (le pire, c'est que c'était un jeu d'enfant!)... Je grimpais sans élan, à l'endroit, à l'envers! On s'est vraiment bien amusé!
Skate et cinéma à Halifax
Quand nous sommes arrivés au centre de Halifax en bateau, nous sommes allés nous balader en ville et Papa a sorti son skate. Il nous a montré quelques trucs pour monter sur la planche à roulettes.
Lorsque nous sommes arrivés sur une petite place, nous nous sommes entraînés pendant que les parents discutaient entre eux. Après maints efforts nous avons réussi à tenir debout et à avancer sur le skate.
Le lendemain, nous sommes revenus avec Papy sur cette place et nous avons continué notre apprentissage rigoureux.
Ensuite, nous sommes allés voir un court-métrage qui parlait du Bluenose, un bateau qui avait été conçu pour participer à une course nommée la Fisherman Race. Il était très rapide, ce qui lui permettait d'arriver le premier sur les grands bancs de Terre Neuve où on pêchait la morue à l'allée et à la criée au retour. Il a gagné toutes les courses de la Fisherman Race auxquelles il a participé. Le film était diffusé dans une demi-sphère juste à côté du musée maritime d'Halifax...